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Colloque "Formation professionnelle : quels enjeux ? quels moyens ?" Une expression forte et légitime de la FSU

mercredi 4 décembre 2013

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L’institut de recherches de la FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire a organisé le 14 novembre 2013 un colloque sur le thème "Formation professionnelle : quels enjeux ? quels moyens ?". Les débats se sont articulés autour de 3 tables rondes :

  • À quoi servent l’éducation et la formation professionnelle ?
  • Les contenus de la formation professionnelle
  • Un service public de la formation professionnelle et de l’orientation ?

Cette journée d’études fut l’occasion de confronter et de croiser les points de vue sur ces questions au travers des interventions des représentants des différentes parties de la formation professionnelle : organisations syndicales de la FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire (SNES SNES Syndicat national des enseignements de second degré , SNESUP, SNETAP, SNUTEFI), CGT CGT Confédération générale du travail , membres du CESE (Conseil Économique Social et Environnemental), représentant du MEDEF, enseignants chercheurs, élus politiques, …

À quoi servent l’éducation et la formation professionnelle ?

Le constat de base, sur lequel sont tombés d’accord la totalité des intervenants, est que l’ascenseur social est actuellement en panne dans notre pays. Une des réponses possibles serait d’instaurer une discrimination positive favorisant les populations issues de milieux sociaux moins favorables à la poursuite d’études.

L’entreprise déplore souvent le manque de relations entre le monde enseignant et le monde de l’entreprise. Ses représentants seraient ainsi favorables à multiplier les liens entre ces deux mondes afin d’éviter une « diabolisation » , qui semble cependant réciproque. Dans le même temps, en effet, le monde enseignant constate aussi, que les professionnels peuvent être réticents à intervenir dans l’école. Ce sont d’ailleurs le plus souvent les cadres qui interviennent et rarement les ouvriers dont les témoignages seraient souvent importants pour les jeunes.

L’entreprise doit aussi entendre les attentes de la société et des familles lors de la formation. Lorsqu’un jeune vient en formation en entreprise, il vient aussi pour se former en tant que citoyen et apprendre à vivre en société.

L’entreprise dénonce parfois aussi le manque d’efficacité de la formation initiale et est même amenée, dans certaines situations, à effectuer sa propre formation interne afin de compléter la formation du système éducatif. L’entreprise se heurte ici à une situation paradoxale : elle souhaite des exécutants, opérationnels immédiatement, mais veut également de l’adaptabilité.

On peut d’ailleurs souligner qu’il faut sans doute distinguer la formation professionnelle initiale (pour les élèves et apprentis) et la formation professionnelle continue (pour les salariés) puisqu’elles relèvent de deux attentes différentes même si on doit pouvoir trouver un certain nombre de convergences.

À la question de l’utilité de la formation professionnelle, certains seraient tentés de répondre qu’elle a avant tout pour rôle de former des jeunes en vue de leur « employabilité » immédiate sur le marché du travail. Pour la FSU, il faut sortir de ce seul cadre imposé par la stratégie de Lisbonne en 2000. L’éducation et la formation professionnelle ne doivent pas tomber dans le travers d’un « adéquationnisme » direct avec le monde de l’entreprise local. Elles doivent aussi assurer leur rôle de formation générale et permettre au jeune formé de s’émanciper dans sa future vie de salarié.

C’est dans ce même cadre que s’est développée la notion de « compétences », au point que celles-ci deviennent « la monnaie mondiale de l’humanité » selon les termes d’une représentante de l’OCDE.
Au-delà de ce seul cadre et de cette réponse dominante, il a existé, et il existe encore, d’autres systèmes de formation : éducation populaire, autoformation dans le monde ouvrier initiée par Fernand Pelloutier…

La FSU conteste l’utilisation de cette notion de « compétence » dans les objectifs de la formation initiale.
Par ailleurs, l’idée d’un service public unifié (formation initiale et formation continue) doit être réinterrogée.

Les contenus de la formation professionnelle

Une des étapes importantes dans la construction des diplômes a eu lieu avec l’instauration des CPC (Commission Professionnelle Consultative). Ce système a cependant rapidement montré ses limites avec un « paritarisme sans parité » (organisations syndicales ouvrières très souvent absentes, poids des organisations patronales très inégal suivant les branches) et un rôle consultatif qui limite son pouvoir. C’est ainsi, par exemple, que la Réforme de la Voie Professionnelle a récemment été dénoncée par les organisations syndicales d’enseignants en CPC mais a été mise en place en force.

Autre étape importante : la mise en place de référentiels en 1980 qui a pour objectif d’harmoniser les contenus et les certifications des diplômes. Cependant, à l’heure actuelle, la majorité des référentiels reste très disparates et peu accessibles.

Un des paramètres qui a nettement influencé les contenus de la formation professionnelle réside dans l’absence de vision prospective et les incertitudes qui ont pesées sur les politiques scolaires au cours du temps. Les diplômes de niveau V (CAP CAP Commission administrative paritaire

C’est une instance de représentation et de dialogue de la fonction publique française.

Les CAP sont chargées d’examiner des situations individuelles, mais elles soumettent aussi parfois des motions à caractère collectif.
et BEP BEP Brevet d’études professionnelles ) sont à cet égard révélateurs. Dans les années 80, le patronat souhaitait voir disparaitre ce niveau. Aujourd’hui, il souhaite, au contraire, une augmentation du nombre de diplômés de niveau V.

Dans le même temps, le BEP est devenu un « diplôme intermédiaire » et le Bac Pro poursuit une double finalité : insertion et poursuite d’études.

De plus l’obtention d’un diplôme ne garantit pas un emploi. L’employeur conserve un pouvoir décisionnaire.

Pour la CGT, le salarié subit la formation professionnelle : il est coupable de ne pas être suffisamment formé ! On culpabilise également les demandeurs d’emplois. Le patronat refuse la reconnaissance des diplômes car elle implique une rémunération utilisant une grille de salaires. Avec une vision « entreprise », le savoir est transformé en savoir-faire, la rémunération est liée au poste occupée et non au diplôme obtenu. La fonction de tuteur, ou de maitre d’apprentissage, doit être reconnue et (re)valorisée.

Il faut également, sans doute, remettre en cause le niveau d’exigence en voie professionnelle qui est, pour certains membres du système éducatif, une véritable escroquerie. Il faut revenir sur l’opposition manuel/intellectuel.

Un service public de la formation professionnelle et de l’orientation ?

Il faut tout d’abord préciser que si la formation professionnelle comporte 2 composantes (formation scolaire et formation continue), elle relève aussi de 2 logiques et de 2 organisations différentes.

La formation des jeunes sous statut scolaire relève ainsi du service public de l’Éducation Nationale. Cependant les régions ont compétence sur les lycées et ont vu leur pouvoir renforcé récemment avec la loi de refondation de l’Ecole pour ce qui concerne la carte des formations.

La formation des adultes est assurée, elle, par différentes structures : publiques (GRETA GRETA Groupement d’établissements publics d’enseignement qui organise des actions de formation continue pour adultes , CFPPA CFPPA Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole
(formation continue pour adultes)
), associatives (AFPA) mais aussi privées (relevant ainsi directement du monde de l’entreprise). Par ailleurs, le système actuel fonctionne sur une logique de marché avec des appels d’offre dans le cadre du « mieux-disant ». Selon certains intervenants de ce système, cela pourrait ainsi avoir tendance à tirer vers le bas la qualité des formations.

Pour l’entreprise, il faut conserver, voire accentuer ce dispositif. Pour la FSU, le service public d’enseignement et ses personnels doivent avoir pour mission de participer au développement de la formation tout au long de la vie au service de la population.

Un autre élément à prendre en compte dans ce contexte se trouve dans les risques et différentes tentatives de régionalisation qu’a du subir le système de formation professionnelle.

Une décentralisation irréfléchie dans ce domaine percuterait le servie public d’éducation et le service public de l’emploi. Elle ouvrirait le champ à une régionalisation de l’école en général. Un tel choix rendrait impossible toute mise en ½uvre d’une politique nationale d’élévation des qualifications en éclatant le service public en 26 politiques régionales.

Par ailleurs, il faut préciser que la formation professionnelle ne peut pas être la seule réponse à une situation plus que tendue en termes d’emploi et d’insertion sociale. On peut en effet rappeler qu’il y a actuellement 5 millions de demandeurs d’emploi inscrits (8 à 9 millions en réalité, semblerait-il) et que le contexte a nettement évolué depuis une vingtaine d’années : plus de jeunes et plus de séniors en recherche d’emploi, périodes de chômage plus longues…

Dans ce cadre, Pôle Emploi prend en charge les adultes et l’Éducation Nationale, par l’intermédiaire de son réseau de CIO, prend en charge les jeunes.

Pour la FSU, la solution consisterait à construire un véritable service public d’orientation en deux branches :
  • L’une, la branche scolaire, doit s’appuyer sur les actuels CIO avec une augmentation de co-psy pour assurer un véritable suivi
  • L’autre, la branche salariés ou en recherche d’emploi, doit s’appuyer sur les structures publiques existantes (Pôle Emploi et GRETA) en partenariat également avec l’AFPA et les Missions locales

Ces 2 branches devraient être en relation étroite afin d’améliorer la qualité du service rendu aux usagers et d’être en mesure de répondre aux attentes de la société en terme de formation et d’orientation, aussi bien pour les jeunes que pour les adultes.

En conclusion

L’expression de la FSU sur l’ensemble de ces questions est d’autant plus forte et légitime qu’elle intervient, par l’intermédiaire de ses différents syndicats, sur tous les maillons de la chaîne formation-emploi.

La principale ambition de la FSU, dans ce domaine, est que l’ensemble des jeunes et des adultes bénéficie d’une formation et un emploi le plus émancipateurs possibles. Au prétexte que le contexte social imposerait une urgence, la FSU ne souhaite pas sacrifier ses choix et ses ambitions. Elle ne peut par exemple accepter la tentation de "l’adéquationnisme" formation-emploi qui ne donne aucune vision prospective.
Elle entend porter la nécessité de réflexion sur le lien et l’articulation entre la formation initiale et la formation continue ou sur la place de l’apprentissage (qui n’est pas LA solution) et son lien avec la formation scolaire.