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Une réelle politique de service public au MASA, faut-il encore y croire ?

Compte-rendu de l’audience ministérielle

jeudi 31 août 2023

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Ce lundi 28 août au matin, une délégation de 6 secrétaires nationaux de l’Élan Commun a été conviée en bilatérale pour 2h d’échanges par le Ministre de l’Agriculture, en présence du Directeur de cabinet, de la conseillère à l’enseignement agricole, de la Secrétaire Générale, du Chef du SRH, du Directeur Général et du DGER DGER Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche adjoint.

Un travail de concertation a eu lieu en amont le vendredi afin de préparer cette audience : 2 axes de réflexion “Salaires et conditions de travail” et “Politiques publiques et moyens de les mettre en œuvre” ont été retenus comme points d’entrée de la discussion. Des questions découlant de chaque axe ont été envoyées au préalable au cabinet.

Le Ministre a introduit les échanges en abordant rapidement et avec satisfaction les élections professionnelles qui se sont déroulées par voie électronique et n’ont pas été simples à organiser. Il a par ailleurs évoqué des sujets nationaux tels que la qualité de vie au travail, les bons résultats de l’Enseignement Agricole aux examens et en terme d’insertion professionnelle, ou encore le projet de Pacte et de Loi d’Orientation Agricole (PLOA) avec pour objectif de “fixer une politique publique”…

Il a ensuite laissé la parole aux membres de la délégation.

Salaires et précarité

Interrogé d’abord et avant toute autre considération par l’Élan commun sur la revalorisation salariale sans contrepartie pour l’ensemble des agent.es du MASA qui ne vient toujours pas, une revalorisation à la mesure du passif (gel du point d’indice des fonctionnaires des années durant) et d’une inflation sans précédent (+ 20% au niveau de l’alimentation sur ces 18 derniers mois, + 15% au niveau des fournitures scolaires, sans parler de l’énergie...), le Ministre, après avoir reconnu la réalité des difficultés touchant les agent.es, a indiqué que l’objectif du gouvernement était de contenir cette inflation, mais en ajoutant qu’il n’y aurait pas de retour en arrière quant aux augmentations des prix déjà subies (sic). Par ailleurs, en dehors des mesures gouvernementales déjà actées et dont il est notoire qu’elles ne sont pas du tout à la mesure de la perte avérée de pouvoir d’achat (à l’image de l’aumône de +1,5% d’augmentation du point d’indice annoncée avant l’été), le seul engagement notable qui a été confirmé concerne la révision des traitements des agent.es contractuel.les du ministère afin de les porter à hauteur de 90% de ceux des personnels titulaires exerçant les mêmes fonctions contre les 70% pratiqués jusque là au MASA. Précisons toutefois que sont exclu.es du périmètre les agent·es non titulaires de l’enseignement agricole – les ACEN ACEN Agent Contractuel des établissements d’Enseignement, à gestion Nationale parce qu’ayant déjà vu leur grille révisée favorablement (victoire arrachée syndicalement il y a maintenant 2 ans et entrée en vigueur cette année) et les ACB de CFA CFA Centre de Formation d’Apprentis -CFPPA CFPPA Centre de Formation Professionnelle et de Promotion Agricole
(formation continue pour adultes)
(parce que relevant de l’employeur EPL EPL Établissement Public Local et non du ministère).

Concernant spécifiquement les ACB, le ministre confirme son engagement à trouver les voies et moyens pour améliorer les conditions de travail et de rémunération des agents de CFA-CFPPA, tout en indiquant ne pas être convaincu à ce stade de la nécessité de passer par la voie législative (avec un décret) pour aboutir à des références nationales pour autant nécessaires en terme de temps de travail notamment. Les travaux de la commission nationale vont se poursuivre sur septembre et octobre et une phase de négociation ministérielle suivra avant arbitrages et décisions fin novembre.

L’Élan commun a poursuivi sur les intentions du gouvernement sur le quinquennat en matière de plan de titularisation. Le ministre s’est contenté d’indiquer qu’à sa connaissance il n’y avait rien de prévu en ce sens... ajoutant que certes, cela pouvait participer de l’attractivité des emplois, mais que ce n’était pas la seule voie. Dit autrement, le président Macron entend poursuivre sa politique vers une fonction publique du contrat et d’agent·es précaires au détriment du statut et de fonctionnaires... et ce n’est certainement pas la nature contractuelle (avec lettre d’engagement, payé au service fait) du « pacte enseignant » qui nous démentira !

Le ministre ne nie pas pour autant les problèmes de précarité qui se posent au sein des Service d’inspection vétérinaire et phytosanitaire aux frontières (SIVEP), il confirme l’organisation de concours régionaux d’ici 6 mois pour écarter les soucis de mobilité...

Persistant sur cette question de l’appui aux agent.es du MASA dans ce contexte inflationniste qui perdure, l’Élan commun a relayé avec force les vœux exprimés lors de la dernière assemblée générale de l’ASMA ASMA Association d’action sociale, culturelle, sportive et de loisirs du ministère de l’agriculture , en demandant en particulier que le ministère donne enfin droit à une revalorisation de la subvention ministérielle octroyée au titre de l’action sociale et qui n’a pas augmenté depuis plus de 10 ans maintenant... Nous avons aussi échangé autour d’une subvention exceptionnelle ou encore d’aides d’urgence confortées dans le cadre de la commission de secours du ministère (https://elan-commun.fr/2022/11/18/aides-sociales-lelan-commun-sadresse-au-ministre-de-lagriculture-marc-fesneau/). Le Ministre a entendu ces demandes et mandaté la Secrétaire Générale pour aborder ces points spécifiques avec les représentant.es des organisations syndicales au bureau de l’ASMA, celle-ci devant les recevoir d’ici l’automne. L’Élan commun et les personnels du MASA jugeront donc sur pièce !

Prévention et conditions de travail

L’Élan commun a partagé avec les représentant.es du ministère le constat d’un manque criant de médecine de prévention au détriment de trop nombreux·euses agent.es du MASA, le Ministre demandant à la Secrétaire Générale de faire établir un point exhaustif des zones ou services non couverts par une médecine de prévention. Si il a été rappelé que la loi de finance 2023 a permis l’ouverture de 15 postes de médecins scolaires de réseau rattachés aux DRAAF DRAAF Direction Régionale de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Forêt (recrutement toujours en cours) pour l’enseignement agricole, ceux-ci n’auront pas vocation à compenser l’absence ou les difficultés liées à la médecine de prévention des agent·es. Ainsi, force a été de constater que le Ministre et ses services n’ont pas pu mettre en avant une solution sinon consistante en tout cas opérationnelle… outre d’essayer de renforcer ou de réamorcer des conventions avec la MSA MSA Mutualité sociale agricole ou d’explorer la piste d’infirmier·es du travail. A la demande de l’Élan commun que soit engagée une réflexion sur la possibilité de création d’un service de médecine de prévention propre au MASA (format médecine du travail), plutôt que d’attendre la multiplication des plaintes d’agent.es dans l’impasse et des condamnations devant les tribunaux (comme il y a quelques temps en région Pays de Loire), le Ministre a répondu favorablement et a mandaté la Secrétaire Générale en ce sens.
Puis, nous avons tenu à revenir sur la situation des infirmier.es de l’Enseignement Agricole en poste dans nos EPL, ceux-ci ayant en intersyndicale alerté le 12 juillet dernier le ministère sur leurs conditions d’emploi en mettant l’accent sur leur mal-être au travail, le manque de considération (rémunération, formation, absence de poste,…) et de dialogue (réseau). Le ministre a mandaté le DGER DGER Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche pour qu’il planifie une audience avant l’automne afin d’entendre et d’échanger directement avec les représentant·es de ces personnels. Le DGER a par ailleurs reçu favorablement la demande de l’Élan commun pour que dans le cadre du GT programmé à l’agenda social du ministère sur les dotations d’objectifs le sujet des EPL sans poste d’infirmière soit repris de façon volontariste.
L’Elan Commun est enfin intervenu sur la lutte contre les discriminations et les problèmes d’accompagnement récurrents pour les agent·es en situation de handicap (RQTH). Il a souligné les difficultés dans le ministère, en particulier dans l’EAP EAP Enseignement Agricole Public
ou
Emploi d’avenir professeur
, concernant la mobilité et les aménagements de poste. Le Ministre au sortir de l’échange a mandaté la Secrétaire Générale du MASA pour tenir un groupe de travail (GT SG SG Secrétariat Général ) axé sur des cas concrets, avec un volet spécifique pour l’EAP, afin d’apporter des solutions et d’éviter la persistance de telles situations.

Directions Départementales

Concernant les DDSCPP et l’influenza aviaire, un rapport de la Commission européenne a révélé des lacunes dans les mesures contre l’influenza aviaire en France en 2022. Il a souligné le besoin urgent de personnel qualifié et formé. Les autorités n’ont pas mis à jour le plan d’intervention national, compromettant leur réactivité en cas d’urgence. Les centres de lutte contre les maladies ont manqué d’expertise en temps opportun. Le rapport a recommandé des mesures préventives et un personnel compétent pour mieux faire face aux crises. Pour l’Élan commun, il est essentiel que le ministre présente les mesures qu’il compte prendre pour former le personnel contre l’influenza aviaire, en tenant compte des lacunes identifiées. Le ministre répond en mettant en avant la reconnaissance de l’importance de la formation, soulignant que des mesures concrètes seront prises. Il mentionne un prochain rapport du CGAER ainsi qu’un plan de formation lié à la vaccination des canards à partir du 12 octobre. Des indemnités pour la gestion des crises seront mises en place avant la fin de l’année.

Concernant les abattoirs, l’État français a été reconnu coupable de "carence fautive" dans la supervision des abattoirs, suscitant des inquiétudes sur le bien-être animal et la sécurité alimentaire. Plusieurs tribunaux administratifs ont pointé des violations des réglementations dans des abattoirs tels que ceux du Faouët, de Briec et du Pays de Soule. Les enquêtes ont révélé des manquements majeurs, même après des inspections non annoncées. Des actions concrètes sont attendues par les agent·es et leurs représentant·es pour améliorer la surveillance et le respect des normes. Le ministre admet des problèmes d’attractivité des postes, des difficultés dans la gestion des ressources humaines et un manque de prise de conscience de la part des abatteurs. Il souligne les conséquences négatives sur le bien-être animal et les filières. Un projet de maillage territorial est en cours pour faire face aux difficultés des abatteurs. Pour l’Élan Commun, ceci prouve l’absence de pression exercée sur les abatteurs malgré le plan de relance qui aurait pu sensiblement améliorer les conditions de travail des agent·es. Nous pouvons également nous attendre à une concentration des abattoirs qui, si elle advient, aurait des conséquences particulièrement négatives sur le bien-être animal et les postes à pourvoir.

Concernant enfin les DDI et les SGCD, le Ministre mandate la Secrétaire Générale pour organiser rapidement avec l’Élan commun une bilatérale spécifique sur les difficultés du quotidien qui dégradent les conditions d’exercice des agent.es (problème de budget, fournitures, problèmes de procédures en SEA, mobilité, …). 
Enseignement Agricole

Concernant l’Enseignement Agricole, l’Élan commun a tenu à porter 3 demandes ciblées :

  • sur les épreuves de spécialités du bac général et technologique qui ne se tiendront plus en mars mais en juin, décision tardive du gouvernement au regard des progressions que les enseignant.es vont devoir ajuster à 4 jours de la rentrée, mais demandée quasi unanimement tant par les professeur·es que par les représentant·es de parents d’élèves, nous avons sollicité la réunion d’un groupe de travail en urgence pour observer les incidences pratiques qui se doivent de l’être, notamment au niveau du STAV, diplôme relevant du seul ministère de l’agriculture. La DGER s’est engagée à inscrire ce point à l’ordre du jour du CSA EA de rentrée prévu mardi 5 septembre prochain.
  • sur les moyens à mettre en œuvre pour un enseignement agricole véritablement inclusif, au-delà de la présentation à la conseillère du ministre des 10 propositions issues du séminaire que nous avions organisé le 15 mai dernier (https://www.snetap-fsu.fr/Le-nouveau-livre-noir-de-l-inclusion-dans-l-Enseignement-Agricole-Public.html), nous voulions que le ministère s’engage à les observer au fond et à ce qu’un nouveau chantier puisse s’ouvrir sur cette question majeure. Le ministre s’est dit favorable et a mandaté la DGER pour s’en saisir dès le premier semestre 2024.
  • sur le plan gouvernemental contre le harcèlement scolaire acté par la Première ministre en juin, nous souhaitions avoir la garantie du plein engagement de notre ministère sur ce champ et les modalités pratiques envisagées dans notre réseau de la DGER aux DRAAF-SRFD SRFD Services Régionaux de la Formation et du Développement jusqu’aux EPL. Le ministre a confirmé les travaux engagés en ce sens, le Directeur Général annonçant sous huitaine le déploiement d’un plan de lutte contre le harcèlement scolaire à destination des équipes, plan propre à l’EA, mais enrichi des toutes dernières dispositions portées par l’Éducation Nationale.
Le Ministre a conclu en réitérant que l’Enseignement Agricole fait partie de ses priorités, y compris budgétaires avec le numérique, l’alimentation et la forêt. Le budget du MASA pour 2023 devrait par suite rester sur la même ligne que le précédent, donc stable au global. Concernant la Loi d’Avenir Agricole, il a tenu à rappeler que les contributions à la consultation sont en ligne. Il a ajouté que le projet de loi sera présenté au Conseil des Ministres en octobre-novembre, puis au Parlement en novembre-décembre.

L’Élan Commun a demandé au Ministre de s’inspirer de ce qui a été réussi dans le cadre de cette concertation PLOA, à savoir que l’ensemble des parties prenantes ont réussi, par delà les antagonismes, à échanger sur l’ensemble des sujets qui vont faire l’agriculture et l’alimentation de demain, afin que notre ministère et notre ministre n’apparaissent pas comme “bunkerisés”, voire en situation de rupture avec les associations environnementales ainsi qu’avec les consommateur.trices.

Paris, le 30 août 2023