Paris, le 4 novembre 2021
Lettre ouverte au ministre de l’Agriculture de l’Intersyndicale BAC PRO
A Monsieur le Ministre de l’Agriculture, Président du Conseil National de l’Enseignement Agricole,
L’intersyndicale de l’enseignement agricole public (FO FO Force ouvrière -EA, CGT CGT Confédération générale du travail -AGRI, SEA-UNSA UNSA Union nationale des syndicats autonomes et SNETAP-FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire ) a rencontré ce mercredi 3 novembre des membres de votre cabinet et de la DGER DGER Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche . A cette occasion, nous leur avons remis une pétition forte de plus de 1300 signatures de professeurs réclamant des inflexions majeures quant au projet de réforme du BAC PRO dans l’enseignement agricole.
L’heure et demi d’échanges a été cordiale et a permis de mettre au jour certaines avancées mais pour nous, toutes relatives, notamment quant à la nécessaire lisibilité sur les modifications apportées aux enseignements en seconde professionnelle ou encore à l’ajout de contenus notionnels aux référentiels. Pour autant, nous devons avouer, Monsieur le Président du CNEA CNEA Conseil national de l’enseignement agricole , que la politique d’équilibre (élaborée et imposée dans l’urgence) prônée par vos représentants ne s’est traduite que par de petits pas dans une direction encore largement indéterminée. De plus, nombre d’engagements pris ce jour ne trouveront de réalité que postérieurement à la tenue du CNEA, censé adopter un avis final ce lundi 8 novembre sur le projet sans aucune visibilité sur leur mise en œuvre... Des engagements après une décision globale, validée ? Voilà qui est pour le moins paradoxal à qui estime que la représentativité des personnels doit pouvoir s’exprimer de façon éclairée. Ce n’est pas notre conception du dialogue social tant vanté et mis en avant par vos services. De plus, encore une fois, ces débuts d’engagements sont assortis de nombreux... "mais".
Des annonces sur le référentiel de formation de seconde professionnelle avancées à début décembre... mais un calendrier "politique" maintenu "à marche forcée"
Vos représentants ont (enfin) acté la nécessité de parler de seconde pro mais seulement après le vote en CNEA sur ce projet de réforme majeur du BAC PRO. S’ils ont bien acté des propositions début décembre (et un groupe de travail CNEA), pour autant nous ne savons toujours rien du contenu : liens avec les modules du cycle terminal, introduction de la semaine de préparation au départ en stage, de la vie de classe, maintien des heures de MAN, enseignement des médias en ESC ESC Éducation socio culturelle qui disparaissent du cycle terminal en l’état du projet mais devraient réapparaître en seconde... Par ailleurs, si l’on estime que cette réforme du tronc commun est prioritaire, comme vos services l’ont affirmé et comme nous pouvons le partager, une application dès l’an prochain ne tient pas compte des parcours élèves de la seconde à la terminale et s’effectuera donc au détriment des élèves actuellement en seconde professionnelle. Ce n’est pas acceptable !
Des précisions sur les contenus d’enseignement, sur les notions majeures... mais seulement en histoire-géographie ???
Si votre cabinet a acté le principe de l’introduction des notions majeures à enseigner, ce qui marque une avancée certaine, pour autant cela ne serait pas valable pour tous les blocs, matières ? Ce que nous contestons fondamentalement. La simple mention des compétences évaluées à atteindre n’est pas suffisante. De même, la prise de connaissance des documents d’accompagnement mi-janvier (des documents amendables alors que les sessions de formation des équipes enseignantes seront déjà lancées ?) n’est pas acceptable non plus.
De nouvelles propositions sur l’évaluation... mais qui ne nous seront communiquées au mieux que 2 jours avant la tenue du CNEA !!
Alors que la DGER a commencé à mesurer la nécessité d’une meilleure prise en compte des matières du bloc scientifique dans l’évaluation du nouveau BAC PRO par la proposition d’une nouvelle version du référentiel d’évaluation, cette nouvelle version a entraîné un déséquilibre majeur entre ECCF et épreuves terminales, entre matières générales et matières professionnelles. A notre proposition de rééquilibrage, la DGER dit vouloir répondre par une nouvelle proposition...à moins de 48h ouvrées de l’instance.
Un accompagnement des élèves reconnu comme nécessaire... mais dont on ne connaît aucun contour, aucune modalité…
Quiconque enseigne, Monsieur le Ministre, dans la voie professionnelle sait que certains élèves sont en difficulté (dès la seconde), sait que certaines classes rencontrent des problèmes et ce d’autant plus après ou depuis l’épisode de la crise sanitaire. Votre cabinet partage ce constat. MAIS aucun dispositif n’apparaît dans le présent projet. Et là encore nous devons attendre, faire confiance. Mais pour quel dispositif et avec quels moyens concrets pour le mettre en œuvre ?
Un EMC réaffirmé dans son existence, censé apparaître dans les grilles horaires en seconde pro... mais sans moyen supplémentaire !
Si la nécessité d’introduction d’un enseignement d’EMC dans la filière BAC PRO fait enfin consensus (depuis 2013...), nous dénonçons la méthode retenue, à savoir d’installer cet enseignement à moyens constants (donc en partant sur un horaire réduit à la portion congrue pris sur d’autres disciplines !). C’est INADMISSIBLE ! Vos représentants se sont contentés de demander à la DGER une étude d’impact du coût de la mise en œuvre... Dans le cadre des échanges en cours de nos organisations avec la Représentation nationale à propos du PLF PLF Projet de Loi de Finances 2022, celle-ci a été, tout groupe politique confondu, particulièrement sensible à la nécessité de permettre enfin à l’ensemble des élèves de France de bénéficier d’un enseignement d’EMC de qualité - seuls les élèves de la voie professionnelle en formation agricole en étant toujours privés. Le coût de mise en œuvre est connu, il reviendrait à 16 ETP ETP Équivalent Temps Plein . Monsieur le Ministre, à notre sens et au regard de l’importance du sujet, un amendement gouvernemental au PLF 2022 permettant cet égal traitement de nos élèves avec ceux de l’Éducation Nationale vous honorerait.
Affectation des heures de pluri, des stages collectifs à des disciplines... pas d’avancées... mais une mission flash de l’inspection d’ici avril sur les effets de ce dispositif.
Malgré les retours négatifs des équipes de STAV qui expérimentent cette non-affectation de la pluri et l’existence d’horaires non affectés en EIE EIE Enseignement à l’initiative de l’établissement , vos équipes persistent dans l’extension de ce dispositif qui renvoie à des arbitrages locaux. Une fois encore, elles proposent un bilan à posteriori... organisé par l’inspection portant ce projet…
Monsieur le Ministre-Monsieur le Président du CNEA, si nous pouvons partager la nécessité de réformer le tronc commun du bac professionnel, cela ne peut se faire qu’avec l’ambition de la qualité des contenus d’enseignement, dans l’intérêt de la formation et du devenir de nos élèves, donc des moyens pour la soutenir, tant dans le temps de concertation et de maturation que dans les dotations horaires, ainsi que par la progressivité de sa mise en œuvre.
Compte tenu de tous ces éléments, l’Intersyndicale considère, Monsieur le Ministre-Monsieur le Président du CNEA que le CNEA du 8 novembre, qui a ces sujets inscrits à l’ordre du jour, NE PEUT ÊTRE CONCLUSIF. Il en va du respect de l’instance que vous présidez et de l’ensemble des membres qui la composent... qui ne sauraient décemment, au regard des sujets majeurs remis pour partie sur l’ouvrage (référentiel d’évaluation, comme de formation, grilles horaires) être mis dans l’incapacité d’observer sérieusement les propositions que votre administration est en train d’élaborer et moins encore de se mandater pour émettre un avis éclairé, les amender le cas échéant et les voter in fine.
Pour le SNETAP-FSU, Clémentine MATTEI, co-secrétaire générale
Pour le SEA-UNSA, Jean Jacques HENRY, secrétaire national
Pour la CGT-AGRI, Thierry JACOB, co-secrétaire général
Pour FO-Enseignement agricole, Nicolas GILOT, secrétaire général adjoint