
Plusieurs médias se sont faits écho des injonctions « très droitières » données par le cabinet de la ministre de l’agriculture dans le cadre d’une campagne publicitaire télévisée pilotée par l’agence bio sous tutelle du ministère de l’agriculture composée de plusieurs spots visant à promouvoir l’agriculture biologique.
Acteur « caucasien », cassoulet : les exigences du ministère de l’Agriculture pour sa pub
Cette campagne « c’est bio la France » dont le premier spot sera diffusé le 22 mai 2025 avait fait l’objet d’allers et retours et de consensus au moment des discussions préparatoires sur les choix dont celui d’un plat de couscous notamment retenu parce que représentant un des plats préférés des français.es. Le tournage arrivait à sa fin quand la ministre a demandé de remplacer le couscous par du cassoulet avec canard et de modifier le casting par un profil « plus caucasien » en lieu et place d’acteur.trices métis. Le 7 avril l’interlocutrice de l’agence bio dit avoir procédé à certains changements dont celui du choix du repas, d’autres confieront leur malaise !
Si le SNETAP-FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire se félicite de la promotion de l’agriculture biologique et de la consommation d’aliments sains, sans pesticides de synthèse, dans le cadre du programme « Ambition Bio 2027 », en revanche il ne peut que contester et dénoncer vivement les injonctions de la ministre.
En effet, elles traduisent son positionnement très droitier flirtant en fait ici avec les idées populistes et racistes de l’extrême droite. Ainsi, au lieu de choisir la diversité et le métissage de la cuisine française, riche de toutes les cultures qui l’ont construite depuis plus d’un siècle, elle impose un repli sur soi et une vision bien « franchouillarde » des habitudes culinaires des français.es, à rebours de la vraie vie !
D’un point de vue éducatif, le SNETAP-FSU considère que l’alimentation est un objet d’étude qui permet l’éducation à l’alimentation, à la diversité, à l’apprentissage des goûts d’ici et d’ailleurs, éducation relayée par des semaines thématiques mises en œuvre dans les établissements d’enseignement agricole public lors de semaines à l’instar de la semaine du goût.
Par ailleurs, suite à la montée des violences racistes et antisémites dans notre pays, la DGER DGER Direction Générale de l’Enseignement et de la Recherche a choisi à juste titre de faire des Valeurs de la République la priorité de l’année scolaire 24/25. Dans la note de service du 28/08/24 qui précise cette priorité, la DGER insiste sur la prise en compte de l’altérité, la lutte contre toute forme de discrimination , le vivre ensemble, et l’urgence à faire vivre ces valeurs.
Le SNETAP-FSU tient à réaffirmer ici que l’éducation à l’alimentation permet l’ouverture culturelle et l’interculturalité qui vont construire un.e jeune et l’éclairer et lui faire sien.ne ces valeurs.
Du choix du plat, revenons au « profil plus caucasien ». Il était… trop tard pour revoir le casting (dixit la boîte de production en charge de la campagne). Et c’est heureux… mais le mal a été fait. Le SNETAP-FSU tient en effet à rappeler, ce qui se cache derrière ce « profil plus caucasien » ? Ainsi, au 18ème siècle, on classifiait les êtres humains en cinq grandes « races », dont celle-ci… les crânes des Géorgiens constituant alors le parangon de la « race blanche » ! Alors bien sûr, avec l’évolution des mentalités et des connaissances scientifiques, l’emploi du mot s’est réduit au profit de termes plus précis comme "personnes blanches" ou "d’origine européenne". Chacun appréciera la persistance bien rance de ces termes qui font manifestement toujours référence chez les actuel.les occupant.es de l’hôtel de Villeroy rue de Varenne !
Comme l’écrit le sociologue et philosophe Edgar Morin : « La démocratie est, en profondeur, l’organisation de la diversité ». L’égalité et la fraternité sont des valeurs fondatrices de notre République et de notre pays. « Faire société » et « vivre ensemble » c’est d’abord lutter contre les discriminations qui entravent la capacité de chacun à envisager l’autre, à lui reconnaître une existence, à le comprendre et à partager avec lui… cuisine, musique… La culture est la porte d’entrée majeure vers la compréhension de l’autre. Et il est fort regrettable qu’il faille le rappeler à une ministre en charge de l’enseignement, agricole en l’occurrence.
Notre ministère aurait pu et du, à l’occasion de cette campagne de communication, faire du fait alimentaire et du « manger sain » un fait républicain autour des valeurs de liberté, d’égalité et de diversité. C’est bel et bien raté ! Et vu de la rue de Varenne… le moins que l’on puisse dire, à date, c’est que c’est pas bien « biaux » la France !
Paris, le 30 avril 2025