SNETAP-FSU

Syndicat National de l’Enseignement Technique Agricole Public

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Garantir un accès pour tous à l’énergie

vendredi 25 novembre 2022

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Article paru dans le dernier bulletin catégoriel des retraité.es du SNETAP-FSU.

La ressource en énergie et la flambée de ses prix nous interpellent

La sortie du covid et la relance économique qui a suivi ainsi que le conflit en Ukraine et ses conséquences sur les restrictions de l’offre ont fait exploser les coûts de l’énergie. Évidemment, cela ne dédouane en rien la libéralisation de l’énergie, qui les a amplifiés et a révélé ses nombreux avatars.

La disparition d’opérateurs a conduit des foyers à prospecter auprès de la concurrence

Confrontés aux conditions d’élévation de leur fourniture sur le marché de l’énergie, des opérateurs privés se sont montrés incapables d’honorer les contrats souscrits auprès de consommateurs et ont cessé leur fourniture d’énergie. Ainsi, E. Leclerc énergie sans ménagement a coupé la fourniture à ces clients, Cdiscount Énergies et Greenyellow se sont aussi retirés. D’autres, Bulb et Barry énergie ont coulé, Plüm-énergie et Planète-Oui ont été absorbés. Des consommateurs se sont ainsi retrouvés dépourvus de fournisseurs et ont été contraints d’aller prospecter auprès de la concurrence qui leur ont proposé des tarifs sans commune mesure avec leur précédent fournisseur.

Le prix du mégawatt d’électricité anormalement élevé

Les autres opérateurs n’ont pas manqué de répercuter le prix de gros de l’énergie sur le marché à leur client sans renoncer à leur marge. Or, ce prix du marché n’a pas toujours de correspondance réelle avec le prix de la fourniture d’énergie. En effet, dans le cas de l’électricité, ils se fournissent pour partie auprès d’EDF qui est contraint de fournir à ces concurrents 25% de sa production d’électricité d’origine nucléaire au tarif anormalement bas d’une cinquantaine d’euros alors que le prix de marché est proche de mille euros. Évidemment, aucune pondération n’est à attendre des opérateurs, ils répercutent sur les consommateurs le prix de leur fourniture en électricité calé sur celui du gaz naturel.

Des entreprises contraintes de réduire, voire de cesser leur activité

Les industries et plus globalement les activités exigeantes en énergie (métallurgie, cimenterie, agroalimentaire, agriculture, artisans boulangers pour ne citer que celles-ci …) soumises à ce niveau de coût de l’énergie ainsi qu’à une disponibilité incertaine de celle-ci, envisagent pour certaines d’entre-elles de réduire ou de stopper leur activité. Parmi-elles, sont plus particulièrement touchées les petites et moyennes structures qui ne disposent pas d’une demande suffisante pour peser sur l’offre en énergie et ne peuvent délocaliser leur production. Chômage technique et licenciements sont par conséquent à redouter.

La précarité énergétique en perspective

La levée prochaine du bouclier énergétique par le gouvernement avec le recul prévu des plafonnements des prix de l’énergie, aggravera inexorablement les difficultés des foyers dans un contexte plus large de baisse du pouvoir d’achat. Les mesures prises actuellement visent indifféremment les foyers quelques soient le revenu sans véritable priorité au plus démunis. Sans véritable volonté politique à prendre en considération les plus démunis, un accroissement de la précarité énergétique est inévitable.

La nocivité du marché de l’énergie est démontrée

Le néolibéralisme dominant, tant en Europe qu’en France, a organisé depuis la fin des années 90 une ouverture progressive aux marchés du gaz et de l’électricité. Si depuis 2010 en France, ce processus a d’abord concerné la fourniture d’énergie aux entreprises des plus consommatrices au moins consommatrices, elle s’est progressivement élargie à l’ensemble des consommateurs. Reste la sortie des tarifs réglementés dont la fin est prévue en juillet 2023 pour le gaz. Parallèlement, de nouveaux opérateurs concurrents à EDF et GDF se sont développés et GDF a été privatisé. En 2019, le gouvernement projetait une vente à la découpe d’EDF dans son projet Hercule. Le réseau et la production nucléaire étaient censés rester publics. Le mouvement des personnels très remonté contre le projet et la crise « covid » ont conduit le gouvernement à différer le projet. La réélection du président de la République « Jupiter père d’Hercule dans la mythologie » remet le sujet à l’ordre du jour avec notamment une renationalisation d’EDF pour la partie nucléaire et barrage hydraulique, le reste étant pour le moment non dévoilé. Or, la régulation par le marché a fait la démonstration de son inefficacité à assurer la fourniture à tous et toutes, à anticiper et à gérer les crises. Et, alors qu’elle nous promettait des coûts inférieurs par la concurrence ouverte à de nouveaux opérateurs privés, chacun et chacune ont pu apprécier la véracité de telle promesse.

La leçon n’ayant pas été pleinement reçue, il nous appartient de faire valoir nos choix selon trois étapes :

Nous mesurons particulièrement en cette période, l’intérêt de garantir à tous et toutes une régulation du coût l’énergie. L’indifférence des opérateurs privés envers leurs clients jetés sans aucun égard dès que des difficultés apparaissent et soumis à une tarification privilégiant la rémunération des actionnaires, soulève la nécessité de rappeler les origines de l’énergie. Qu’elles soient d’origine fossile, nucléaire, hydraulique, éolienne ou solaire, elles sont tirées de la terre ou du soleil tous deux biens communs de l’humanité. Seules, sa transformation et sa distribution relèvent de l’investissement humain. Elle est un bien commun indispensable à chacun des foyers. Vitale à l’humanité, la production et la distribution de celle-ci doivent être rendues disponibles pour chacun des humains.Un accès à celle-ci et une planification de sa ressource, de sa production et de sa distribution est nécessaire.

- l’urgence à maintenir une réglementation de la tarification du gaz et plus largement de l’énergie

La sortie de la tarification réglementée l’année prochaine du gaz est anachronique et dangereuse pour les foyers et notamment les plus modestes. Il nous appartient d’attirer l’attention et de susciter un mouvement conduisant le gouvernement à retirer cette mesure et à l’élargir selon des modalités à soumettre au débat aux entreprises afin de minimiser autant que possible les effets sociaux induits par les baisses et suppressions d’activité.

- la nationalisation ou la renationalisation, conditions d’un égal accès à l’énergie

A la sortie de la seconde guerre mondiale, le gouvernement issu du CNR (conseil national de la résistance) a nationalisé l’énergie pour permettre au pays de se redresser et offrir aux foyers une énergie disponible. Depuis, les privatisations engagées de la décennie 1990 dévoilent peu à peu leur incapacité à couvrir l’activité et les besoins de chaque humain. La renationalisation de la production et de la distribution de l’énergie avec des adaptations issues des expériences acquises doit être remise à l’ordre du jour.
Le Snetap-FSU FSU Fédération Syndicale Unitaire avec d’autres organisations se sont donnés le mandat d’une instauration de la sécurité sociale alimentaire afin de garantir à chacun et chacune une alimentation de qualité et en quantité accessible. Ce mandat doit s’élargir à l’énergie, elle aussi indispensable à la vie.

- La planification une vertu décriée remise à l’ordre du jour

Les néolibéraux animés en premier lieu par la rémunération des actionnaires n’ont aucunement anticipé les besoins futurs en énergie et pas davantage la transition énergétique laissée à l’initiative désordonnée du marché. Pire, ils ont laissé les opérateurs y compris les historiques, errer sur les marchés et notamment les marchés financiers au détriment de l’investissement, de la maintenance et de la transition écologique à opérer. Aujourd’hui pris à dépourvu par cette crise aux origines multiples, ils redécouvrent les vertus d’une nécessaire planification de l’énergie qu’ils décriaient encore hier, la considérant à l’apogée de leur confiance portée à la régulation par le marché. Si nous pouvons nous retrouver sur cette planification, elle ne pourra pas faire l’économie de débats contradictoires auxquels nous nous inviterons et invitons chacun et chacune à les exiger puis à y participer.

Serge Pagnier